CABINET D’AVOCAT À LYON EN DROIT DES VICTIMES
ET RÉPARATION DU PRÉJUDICE CORPOREL

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L'indemnisation des victimes d'agressions sexuelles et de viol

Maître Anne-Gaëlle FINET

Maître Anne-Gaëlle FINET

Avocat au barreau de Lyon

Le cabinet de Maître Anne-Gaëlle FINET est depuis plus de 20 années entièrement dédié à l’accompagnement et la défense des victimes de dommages corporels graves ou d’ayants-droit de victimes décédées dans le cadre d’accidents de la circulation, d’erreurs médicales…

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Les agressions sexuelles et le viol

 

Un viol ou une agression sexuelle n’est pas une infraction comme une autre.

Elle touche à la partie la plus intime de son être et fragilise durablement.

Dénoncer les faits dont on a été victime peut apparaitre insurmontable tant il est même difficile de les énoncer.

Ce n’est parfois qu’après des années de thérapies, que les victimes envisagent de porter plainte.

De multiples questions se posent alors…

 

Qu’est-ce qu’une agression sexuelle ou un viol pour le code pénal ?

Le premier travail de la justice est celui de la « qualification des faits » vécus par la victime.

Les sanctions et les règles applicables (compétence juridictionnelle, délais de prescription) sont différentes qu’il s’agisse d’un viol ou d’une agression sexuelle.

Pour le code pénal (article 222-22) l’agression sexuelle est caractérisée par le fait d’imposer à la victime un acte à caractère sexuel (caresses, attouchements, …).

Le viol fait partie des agressions sexuelles, mais constitue une infraction particulière puisqu’il nécessite un acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit.

La pénétration doit avoir lieu sur la personne d’autrui (la victime) ou sur la personne de l’auteur depuis la loi n°2018-703 du 3 août 2018.

Ce qui caractérise avant tout ces infractions c’est l’absence de consentement de la victime.

La justice va rechercher si l’acte a été obtenu par violence, la contrainte, la menace ou la surprise

La violence n’est pas seulement physique mais peut être morale.

La jurisprudence considère que la violence physique peut être à l’encontre de la victime elle-même mais également d’un tiers si elle a pour effet d’influencer le consentement de la victime (Crim. 8 juin 1994, no 94-81.376).

La violence morale suppose quant à elle que l’auteur utilise des procédés qui conduisent la victime à craindre un mal considérable, pour elle ou pour ses proches.

La contrainte peut également être physique ou/et morale.

Elle est morale lorsque l’auteur exerce une pression qui prive la victime de sa capacité à refuser.

S’agissant des victimes mineures, la loi du 3 août 2018 ajoute que lorsque ces faits sont commis sur un mineur de 15 ans, la contrainte morale ou la surprise sont caractérisées par l’abus de vulnérabilité de la victime ne disposant pas du discernement nécessaire pour ces actes.

La contrainte peut également résulter de la différence d’âge entre la victime mineure et l’auteur des faits et de l’autorité de droit ou de fait qu’il exerce sur la victime, d’autant plus lorsque l’auteur est majeur et qu’il en résulte une différence d’âge significative.

Les juges apprécient au cas par cas et en fonction des éléments de l’enquête si la contrainte peut être constitué par un écart d’âge.

Tel est le cas par exemple d’un professeur de karaté, connu, « lui conférant une autorité certaine, [qui] a su créer une proximité relationnelle et affective avec des jeunes garçons, les plaçant dans une situation de dette en leur offrant divers cadeaux » (Crim., 18 février 2015 n°14-80772).

 

La menace peut être constituée par un geste, une parole ou un acte par lequel un individu exprime sa volonté de faire du mal à quelqu’un. Cette notion se rapproche donc de la notion de violence morale et de la contrainte morale, d’autant plus que la menace doit être contraignante pour être caractérisée.

 

La surprise peut également caractériser l’absence de consentement.

C’est le cas par exemple lorsqu’un médecin ORL profite de son autorité professionnelle pour abuser sexuellement une patiente, lui imposant des actes d’investigations vaginales et anales non nécessaires (Cass., ass. plén., 14 févr. 2003, n°96-80.088).

La surprise peut résulter également d’un stratagème.

Récemment, la Cour de cassation a condamné un homme qui a eu recours à un stratagème pour dissimuler son apparence physique. En l’espèce, l’auteur des faits se présentait sur site de rencontre comme un bel homme, avec une photo très avantageuse. Il demandait aux femmes qui l’avaient contacté de la rencontrer, mais dans des circonstances qui lui permettaient de cacher son identité jusqu’à la fin de l’acte : dévêtue, les yeux bandés, les mains attachées. A la fin de l’acte, l’homme enlevait le bandeau des yeux de la femme, qui découvrait en réalité un homme dont le physique était à l’opposé de sa photo de profil.

La Cour a estimé que « constitue un viol le fait de profiter, en connaissance de cause, de l’erreur d’identification commise par une personne pour obtenir d’elle un rapport sexuel » (Crim. 23 janv. 2019, FS-P+B, n° 18-82.833)

 

Les Juges étudient ainsi au cas par cas, en fonction des situations bien précises dans lesquelles se trouvaient la victime au moment des faits l’absence de consentement.

 

Quels sont les délais pour agir en cas de viol ou agression sexuelle ?

Le viol et les agressions sexuelles sont soumis comme toute infraction pénale à des règles de prescription.

Les délais de prescription diffèrent selon la qualification des faits (viol ou agression sexuelle) et de l’âge de la victime.

  • Pour les victimes mineures au moment des faits

Pour les victimes de viol durant leur minorité, la loi accorde désormais un délai de prescription de 30 ans. (Article 7 du Code de procédure pénale).

Cela signifie concrètement qu’une victime pourra agir jusqu’à ses 48 ans si aucune procédure n’a été engagée préalablement pour les mêmes faits.

Pour une victime d’une agression sexuelle autre qu’un viol, subie à l’âge de 15 ans ou moins, le délai prescription est de 20 ans à compter de la majorité. Elle pourra agir jusqu’à ses 38 ans.

Pour une victime qui avait plus de 16 ans au moment des faits, le délai de prescription est de 10 ans et elle pourra agir jusqu’à ses 28 ans (Article 8 du Code de procédure pénale).

 

  • Pour les victimes majeures au moment des faits

Le délai de prescription pour un viol commis sur une personne majeure est de 20 ans à compter du jour où l’infraction a été commise.

Pour les autres agressions sexuelles autres que le viol, le délai est de 6 ans à compter de la commission de l’infraction.

Des délais spécifiques peuvent s’appliquer en cas de circonstances aggravantes.

 

Comment puis-je porter plainte ?

Vous pouvez déposer plainte auprès de la police ou de la gendarmerie, éventuellement après avoir pris un rendez-vous téléphonique pour que la rencontre soit organisée.

Si cette démarche vous paraît trop difficile, vous pouvez également saisir directement le Procureur de la République par une lettre recommandée avec accusé de réception. Cette lette devra être datée et signée, et devra comporter un récit détaillé des faits. Le Procureur vous demandera néanmoins certainement de vous rendre dans un poste de police ou de gendarmerie pour que votre déposition soit consignée dans un procès-verbal.

La plainte peut être déposée contre X si vous ne connaissez pas l’identité de l’auteur des faits.

Si le dépôt de plainte se fait directement en police ou en gendarmerie, c’est un officier de police judiciaire qui vous accueillera et qui retranscrira votre récit sur ce qu’on appelle un procès-verbal.

Afin d’instaurer un climat de confiance, vous pouvez demander à ce que la déposition soit faite en présence d’une femme ou d’un homme.

A la fin de la déposition, il est important de prendre le temps de relire le procès-verbal avant de le signer, car parfois la retranscription est partielle ou fausse.

Il est possible qu’à la fin de votre audition, que vous soyez adressé(e) à un service spécialisé pour une consultation médicale, notamment en cas de viol.

Cette consultation est certainement difficile, et vous pourrez vous faire accompagner, mais elle est essentielle pour recueillir les preuves nécessaires à l’identification de l’auteur. De plus, des soins pourront vous être apportés si vous en avez besoin.

 

La plainte est donc nécessaire puisqu’elle porte à la connaissance de l’autorité judiciaire les faits reprochés et, de ce fait, enclenche la procédure pénale.

Quelle sera la procédure en cas de viol ou d’agression sexuelle ?

La plainte sera transmise au Procureur de la République qui va effectuer des actes d’enquête. C’est-à-dire qu’il pourra demander à ce que soit auditionnés des témoins, le présumé auteur ou tout autre personne qu’il estimera nécessaire.

Il pourra également demander à ce qu’une confrontation entre vous et l’auteur des faits ait lieu. Cette étape est difficile pour toute victime qui se retrouve face à son agresseur, mais peut permettre de faire la lumière sur certains éléments de l’enquête, et de conduire l’auteur à des aveux.

A la fin de l’enquête, le Procureur de la République dispose de l’opportunité des poursuites, c’est-à-dire qu’il décidera de la suite de la procédure.

Il peut notamment décider d’un renvoi en correctionnel en cas de délit (l’auteur des faits sera alors convoqué et jugé par un Tribunal correctionnel, pour les faits d’agression sexuelle par exemple) ou d’un renvoi devant le juge d’instruction en cas de crime (comme le viol).

En effet, si le procureur de la république estime que les faits sont susceptibles d’être qualifiés de crime, il doit obligatoirement saisir le juge d’instruction par ce qu’on appelle un « réquisitoire introductif » (article 79 du code de procédure pénale).

Il est important de savoir qu’il existe de plus de plus de « correctionnalisation » des affaires de viol. C’est-à-dire que des faits, qui peuvent être qualifiés de viol, seront qualifiés d’agression sexuelle pour qu’ils soient jugés devant le Tribunal correctionnel et non devant la Cour d’Assise, dont la procédure est plus longue et complexe.

Un recours est possible contre cette « correctionnalisation » (article 186-3 du code de procédure pénale).

Enfin, si le Procureur de la République estime que les informations recueillies lors de la première phase d’enquête ne permettent pas d’envisager une poursuite de la procédure, il peut décider de classer sans suite l’affaire.

Le classement sans suite marque l’arrêt de la procédure pénale. L’auteur présumé ne sera pas poursuivi en justice.

 

Que faire en cas de classement sans suite ?

Le classement sans suite n’est pas définitif, ce n’est pas une décision de justice. Il est possible de saisir le Procureur Général près la Cour d’appel compétente qui étudiera si le classement sans suite était légitime ou non.

Il est également possible de relancer la procédure pénale en portant plainte avec constitution de partie civile directement devant le juge d’instruction (articles 85 et suivants du code de procédure pénale).

Cette saisine directe du juge d’instruction est également possible en première intention si les faits reprochés sont constitutifs d’un crime (comme le viol).

 

 

Puis-je demander réparation ?

Une demande en réparation des dommages-et-intérêts de la victime pourra être faite devant les Tribunaux, mais également devant la Commission d’indemnisation des victimes d’infraction (CIVI) qui dispose d’une compétence spéciale en matière d’agression sexuelle et de viol.

 

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Le parcours judiciaire n’est jamais simple pour une victime de viol ou d’agression sexuelle.

Il est essentiel d’être soutenu par des professionnels qualifiés (psychologues, avocats).

N’hésitez pas à nous contacter.